Mais où donc nous emmène l’éternel homme au chapeau de Jean-Michel Folon (1934-2005) avec sa valise tantôt en forme de lune, tantôt en forme d’oiseau, tantôt transportant nos rêves de voyage : paquebot, coin de nature, soleil couchant…?
Les aquarelles aux couleurs tendres et au dessin épuré de l’artiste bruxellois nous plongent dans un univers fantastique et onirique, pour autant empreint d’interrogations sur l’actuelle marche du monde : le gigantisme de la ville, la destruction de l’environnement, la violence, la guerre, les atteintes aux droits humains… « Mes dessins ressemblent à des dessins d’humour, mais ils ne sont pas faits pour rire », disait Folon. Là réside sans doute son talent et son génie : attirer notre attention avec des œuvres originales et belles, puis faire naître en nous malaise et perplexité dès que l’on s’y penche de plus près.
Pour la première fois depuis 30 ans, le Japon passe en revue à la Tokyo Station Gallery, 230 pièces à l’appui, l’ensemble de l’œuvre de Folon selon une approche thématique en forme de questions : Prologue : début du voyage ; Par ici, par là ou ailleurs ? Qu’entendez-vous ? De quoi devrions-nous parler ? Épilogue : où allons-nous à présent ?
On peut notamment y contempler :
– des dessins de la première période après son arrivée à Paris en 1955 et ses premières collaborations avec des magazines américains qui le rendirent célèbre, puis son passage à la couleur en 1965, grâce à sa rencontre avec Colette Portal, artiste elle aussi, qu’il épouse en 1961 ;
– des illustrations d’œuvres littéraires (Kafka, Borges, Apollinaire, Bradbury…) créées dans les années 70 ;
– de merveilleux exemples de « mail art », enveloppes décorées envoyées à ses différents amis et à Paola Ghiringhelli, sa 2e épouse rencontrée en 1970 ;
– quelques sculptures et objets dans la production desquels Folon se lance à la fin des années 80, encouragé notamment par son ami le sculpteur Cesar
– bon nombre d’affiches (il en conçoit plus de 600 !) pour des films et des spectacles mais surtout pour défendre des causes qui lui tiennent à cœur (Greenpeace, contre le racisme, contre la peine de mort…).
Ainsi portés sur les grandes ailes de l’homme au chapeau, alors que défilent sous nos yeux les images d’un monde inquiétant aux multiples flèches indiquant des directions contradictoires, on se prend à songer qu’une autre voie existe, à la fois riche et rédemptrice, celle de l’art et de la beauté !
L’exposition se tient jusqu’au 23 septembre à Tokyo, du 1er novembre 2024 au 23 mars 2025 à Nagoya puis du 5 avril au 22 juin à Osaka.
Tokyo Station Gallery (en anglais)
https://www.ejrcf.or.jp/gallery/english/archive_202407_folon.html
La fondation Folon à Solvay (Belgique) : biographie, œuvre, etc.
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