Le Louvre ne conserve qu’un seul tableau de Jan van Eyck (vers 1390/95-1441) mais quel chef d’œuvre ! Jamais restaurée depuis son entrée en ce musée en 1800, après plus d’une année d’observation en laboratoire suivie de délicats allégements des couches de vernis oxydés, « La Vierge du chancelier Rolin » a retrouvé toute sa splendeur.
Une passionnante exposition d’une soixantaine d’œuvres dans la salle de la chapelle du Louvre est organisée autour de cette peinture. Son commissaire, Sophie Caron, conservatrice au département des peintures du musée du Louvre, a réussi à rassembler six autres œuvres de Jan van Eyck présentées pour la première fois en France (dont « La Vierge de Lucques » du Städel Museum de Francfort prêt exceptionnel dans son histoire). Différentes sections permettent de tisser des liens entre « La Vierge du chancelier Rolin » et des réalisations de Rogier van der Weyden (v.1359-1464), de Robert Campin (v.1378-1444), et de Hieronymus Bosch (1450-1510), mais aussi des enlumineurs de ces temps reculés.
Placée au centre de la salle, cette œuvre qui ne peut laisser indifférent, est comme un appel à la méditation. Plus on la contemple, plus on est ébloui par sa magnificence. Couronnée par un ange, cette douce et noble Vierge, dont le corps est enveloppé d’une majestueuse cape rouge aux plis remarquables, bordée de pierres précieuses, a les yeux humblement baissés vers son Fils.
Assis sur les genoux de sa mère, ce bébé nu, très humain, bénit le chancelier Rolin. Etonnamment, Nicolas Rolin, chancelier du duché de Bourgogne dont le visage est un véritable portrait, a été représenté à la même échelle que la Vierge Marie. Revêtu d’un splendide manteau, en prière, à genoux, il contemple cette Mère offrant son Enfant à l’humanité.
La sublime scène se déroule dans un intérieur imaginé, combinant des éléments d’architecture d’église aux chapiteaux romans historiés et de palais médiévaux. Trois arches ouvrent sur un jardin suspendu donnant lui-même sur un paysage traversé en son centre par un fleuve sinueux qui conduit le regard vers de lointaines montagnes…
Le nettoyage de ce tableau a aussi permis de découvrir son revers. Une surprenante imitation de marbre qui peut aussi évoquer un ciel étoilé, très cosmique y est reproduite…
Une œuvre admirable portant une dimension spirituelle fascinante et énigmatique !
Geneviève Bayle
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Jusqu’au 17 juin 2024. Musée du Louvre, Aile Sully, 1er étage, Salle de la Chapelle.
Ouvert tous les jours sauf le mardi. De 9h à 18h, jusqu’à 21h45 le vendredi.
Réservation recommandée en ligne sur louvre.fr