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« Takehisa Yumeji: Taishô Romanticism and The New World » au musée Teien de Tokyo, jusqu’au 25 août 2025

Vêtues de leur grâcieux kimono, les belles femmes longilignes de Yumeji nous regardent souvent d’un air mélancolique, comme celle d’ « Amaryllis » (1919), la toile, redécouverte récemment, qui ouvre l’exposition consacrée à l’artiste au musée Teien pour célébrer le 140e anniversaire de sa naissance.

On y voit sa compagne et modèle, la jeune Oyô au fin visage ovale, qui interrompt sa lecture et dont le regard se perd dans le vide. Assise derrière un guéridon où sont disposés une tasse à café blanche et un pot d’amaryllis dont les opulentes fleurs orange cachent en partie sa chevelure – à moins qu’elles ne lui servent d’ornement? -, elle nous semble inaccessible. Il émane de ce tableau à dominante sombre, habilement rehaussé par l’orange de l’amaryllis et le rouge du col, du bord des manches du kimono et du cordon noué sur le obi bleu-vert, une sorte de sensualité empreinte de tristesse et de désillusion.

Takehisa Yumeji (1884-1934) est bien connu des Japonais, non seulement comme « peintre de belles femmes », mais aussi comme écrivain, poète, illustrateur et designer de couvertures de livres et de magazines, publicités, affiches et articles en tout genre : papier à lettres, enveloppes, cartes postales, éventails, cols de kimono, yukatas…

Né dans le sud du Japon à Setouchi (Okayama), dans une famille de fabricants de saké, il s’enfuit à 18 ans à Tokyo où il vit de petits boulots tout en se frayant une voie dans l’art, vendant dessins et illustrations à des journaux, sans faire la moindre école ni apprendre auprès de quelconque professeur par rejet du système et du statut d’artiste, mais n’en obtenant pas moins, à 21 ans, le premier prix à un concours de dessin d’un magazine. À 24 ans, il épouse une veuve de 2 ans plus âgée que lui, Tamaki, qui tient une boutique de cartes postales. Elle sera son premier modèle et inspirera son idéal de beauté qui deviendra celui de générations de Japonaises, entre modestie et émancipation, tradition et modernité. Il divorcera 2 ans plus tard mais aura 3 fils avec elle…

À 31 ans, il ouvre une boutique d’articles variés dessinés par ses soins dans le quartier de Nihombashi à Tokyo, « Minatoya », rencontre une autre muse, Hikono, jeune fille de bonne famille qui meurt de la tuberculose 6 ans plus tard, mais il fréquente alors déjà Oyô, le fameux modèle d’ « Amaryllis » et peut-être de son tableau le plus célèbre, malheureusement absent de l’exposition, « Kurobune-ya » ? Il y aura d’autres femmes et aussi de grands voyages, aux États-Unis et en Europe, de 1931 à 1933, et enfin un retour précipité au Japon à cause des événements de Berlin puis, l’année suivante, sa mort prématurée à 50 ans, de la tuberculose.

Par sa conception de l’art et par son style de vie, Yumeji est considéré comme le « Toulouse-Lautrec japonais » et c’est un émouvant hommage que lui rend aujourd’hui le musée Teien dans son architecture Art Déco, avec 180 peintures, dessins, illustrations et articles variés qui nous replongent dans l’époque vibrante, passionnée et libre du « romantisme de l’ère Taishô ».

Musées consacrés à Yumeji au Japon :

https://www.yayoi-yumeji-museum.jp (Tokyo)

https://yumeji-art-museum.com/english/ (Okayama)

« Amarylis » (huile sur toile, vers 1919)
« Fin de printemps » (crayon, plume et aquarelle sur papier, 1926)
« Maquillage d’automne » pour la couverture du magazine « The Ladies », estampe (1924)
« Le repos » (peinture sur soie, début de l’ère Showa, à partir de 1926)
Première édition de « Ich Grolle Nicht » (1924, Éditions Senow Music Score)
Le musée Teien et son parc (Tokyo)
« Kurobuneya » (1919), l’oeuvre la plus célèbre de Yumeji, absente de l’exposition.